Les vêtements liturgiques sont des outils importants dans la pratique religieuse. Remplis de symboles et de significations, ils servent à souligner le caractère mystique des actions du célébrant. Les modèles des vêtements utilisés aujourd’hui étaient déjà en usage lors de l’Antiquité. Ils sont donc porteurs d’une longue tradition historique. Au fil du temps, les formes et les ornementations ont varié. Les étoffes se sont alourdies au Moyen Âge et lors de l’industrialisation, les décors ont atteint leur apogée en matière d’extravagance. De nos jours, c’est maintenant un décor et des vêtements clairs et simples qui sont prônés par les célébrants.
Notre patrimoine religieux à l’île d’Orléans recèle de différents vêtements liturgiques sur lesquels on peut voir différentes tendances. Il est cependant difficile de cerner la provenance et l’histoire des vêtements liturgiques de l’île d’Orléans, car peu de ces vêtements ont des étiquettes indiquant la ville ou la date de fabrication. Ils constituent tout de même d’excellents exemples de symboles favorisés par la communauté et ils sont l’héritage d’un riche patrimoine culturel qui remonte à la fin du XVIIe siècle.
Couleurs

Bien que l’on puisse trouver anodine la couleur des vêtements du prêtre, une grande symbolique est reconnue par l’Église quant à la couleur des vêtements et accessoires liturgiques. En changeant la couleur des vêtements qu’il porte, le célébrant peut imprégner ses gestes de différentes significations. Le vert, le blanc, le rouge et le violet sont les quatre couleurs codifiées universellement pour les vêtements liturgiques.
Vert
Le vert est la couleur du quotidien. Il évoque le printemps et la vie, l’espoir et la constance. Les vêtements liturgiques verts servent lors des cérémonies courantes.
Blanc
Comme le blanc est le résultat de la combinaison de toutes les couleurs, il évoque l’absolu ou l’omnipotence. Il s’agit donc de la couleur du Divin qui rappelle la joie et la pureté dérivant de la foi. À Pâques et à Noël, les célébrants portent des vêtements blancs pour souligner l’adoration du Christ.
Rouge
Cette couleur est associée à la Passion du Christ, elle est donc portée entre autres lors du Dimanche de la Passion, le Vendredi Saint et la Pentecôte. On porte aussi le rouge pour célébrer les fêtes des apôtres et des martyrs.
Violet
Le violet peut représenter l’attente, la pénitence et même le deuil. Elle est donc portée durant l’Avent et lors du Carême. Dans les cérémonies funéraires, elle peut être remplacée par le noir.
Symbolique des ornements
Tout comme les couleurs, les éléments décoratifs se trouvant sur les vêtements liturgiques ont des significations particulières, propres à la chrétienté. Il est fréquent que les vêtements soient ornés de nombreux symboles. Voici une brève description des symboles utilisés à répétition dans les vêtements liturgiques de l’île d’Orléans.
Chrisme
Le chrisme est un symbole utilisé par les premiers chrétiens. Il représente les deux premières lettres du mot “Christ” en grec, le chi(X) et le rhô(P). Sur les vêtements liturgiques de l’île d’Orléans, ce symbole est souvent accompagné des symboles d’alpha et d’oméga.
Alpha et Oméga
La première et la dernière lettre de l’alphabet grec, l’alpha et l’oméga sont associées au commencement et à la fin des temps, comme il est mentionné dans l’Apocalypse (i.8 ; 21.6).

IHS ou JHS
Il s’agit d’une abréviation du nom de Jésus en grec. Traduites en français, ces lettres formeraient l'abréviation JES. Certains attribuent aussi ces lettres à l’acronyme «Jésus notre sauveur».
Croix
De nos jours, la croix est le symbole par excellence de la religion chrétienne. Elle représente la souffrance du Christ pour la rédemption des fidèles. Il en existe de nombreux types, comme la croix grecque, la croix huguenote, la croix de Malte, etc.

Pélican
Le pélican est le symbole du sacrifice, du martyr et de la résurrection. Il rappelle le sacrifice du Christ pour la rédemption des chrétiens.
Raisin
Le raisin est utilisé depuis longtemps comme offrande au divin. Avec la communion, le vin, produit du raisin, est consacré. Tout comme le pain, le raisin symbolise la sainte cène et le Christ.

Les vêtements courants

Le vestiaire ecclésiastique est vaste, mais certains éléments sont portés plus souvent que d’autres. C’est le cas de l’amict, l’aube, l’étole et la chasuble. Ces éléments constituent le costume du prêtre lors de la messe habituelle et vous sont présentés dans l’ordre selon lequel le prêtre les revêt. Comme les vêtements liturgiques servent un but précis, celui de préparer le prêtre à pratiquer la messe, l’action de les revêtir est chargée de cérémonie. En effet, chaque vêtement est mis avec une prière particulière pour consacrer l’action.
Amict
Porté sous l’aube, l’amict est un col qui sert à éviter à l’aube de toucher la peau.
Aube
Il s’agit d’une longue chemise aux formes rudimentaires. Elle est traditionnellement en lin. Selon certaines interprétations, comme le lin n’est pas naturellement blanc, l’effort mis dans son blanchiment représente les épreuves et le travail nécessaires pour se défaire du péché. À partir de la Renaissance, elle est ornée de dentelle au col, aux poignets, à l’ourlet. L’aube est le vêtement de base des membres du clergé et elle est portée sous la chape, chasuble ou dalmatique.
Étole
Portée sur l’aube, l’étole est une bande de tissu que l’on passe autour du cou afin qu’elle pende devant soi. L’étole est plus courte que l’aube et plus longue que la chasuble et sa forme varie. Certaines ont des bouts pointus, d’autres ont des bouts élargis. Pour permettre à l’étole de rester en place, elle est généralement en biseau au centre du dos. L’ensemble du clergé porte l’étole, mais de façon différente selon son rôle. Le prêtre va croiser l’étole à l’avant et la retenir avec son cordon d’aube, l’évêque la laisse pendante et le diacre la porte en travers.
Chasuble
Portée sur l’aube et l’étole par le prêtre durant la messe, la chasuble change de couleur selon le temps liturgique et l’occasion de la célébration. Il s’agit d’un vêtement à deux pans, sans manches. Sa forme varie au cours des époques et selon les régions. La chasuble est assortie à l’étole dans sa couleur et sa matière. Elle est le symbole de la charité.
Comme il s’agit du vêtement le plus visible, la chasuble est richement décorée. Au Moyen Âge, la quantité importante de broderies et de décorations rendait l’étoffe impossible à plier et inconfortable à porter. C’est pourquoi la forme de la chasuble a beaucoup changé au fil du temps. Au Moyen Âge, elle était en forme de cercle avec une ouverture pour passer la tête. Puis, elle est devenue en forme de poire et aujourd’hui un juste milieu a été atteint dans sa forme. Elle a retrouvé une partie de son ampleur d’origine tout en permettant les mouvements.
Les vêtements spéciaux

Pour les célébrations particulières et d’importance supérieure, certains vêtements s’ajoutent à l’habillement du célébrant. Il existe aussi certains articles qui sont particuliers à certains postes de la hiérarchie de l’Église.
Dalmatique
La dalmatique est une tunique portée sur l’aube par les évêques et les diacres qui assistent le curé lors des grandes cérémonies. Elle est dotée de manches et arrive au niveau des genoux et est ornée de bandes, au moins deux verticales, appelées clavi.
Chape
La chape est une cape attachée à l’avant. Elle est portée par le célébrant pendant des occasions plus solennelles, comme lors des processions. Comme elle est utilisée lors d’occasions spéciales, la chape est souvent richement décorée.
Manipule
Le manipule est de forme semblable à l’étole, mais il est plus court. Symbole du travail et des souffrances, le manipule se porte au bras gauche et il sert à essuyer les larmes et la sueur du pratiquant. Le manipule était auparavant porté à toutes les célébrations, mais depuis le concile Vatican II, il n’est plus obligatoire et rarement porté.
Voile huméral
Il s’agit d’un grand châle que le prêtre ajoute sur ses épaules lorsqu’il tient dans ses mains l’ostensoir.
Un patrimoine riche d’informations
Dans l’inventaire du patrimoine religieux de l’île d’Orléans, on retrouve plus de 300 articles de vêtements liturgiques, dont principalement des étoles et des chasubles. La variété de cet inventaire nous donne un aperçu de l’ampleur du patrimoine religieux de l’île d’Orléans et de la richesse de l’iconographie chrétienne. Ce patrimoine débordant d’informations contribue à la richesse culturelle du Québec.
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Crédits
Exposition: Émilie Jean et Geneviève Beaulieu
Remerciements: Laurier Turgeon
Photographies: Répertoire du patrimoine culturel du Québec et Shutterstock