Sainte-Pétronille

    Intérieure église de Sainte-Pétronille
    Intérieure église de Sainte-Pétronille
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Historique

Plus jeune paroisse de l’île, Sainte-Pétronille est érigée canoniquement en 1870. Malgré sa grande beauté, ce n’est point pour honorer cette qualité qu’on lui confère le vocable de « Village de Beaulieu ».  Au milieu du XVIIe siècle, l’actuel territoire de Sainte-Pétronille constituait un arrière-fief de la seigneurie de Beaupré. Depuis le troisième mariage de la propriétaire Éléonore de Grandmaison avec Jacques Gourdeau de Beaulieu, les habitants ont vraisemblablement souhaité conserver le nom du nouveau seigneur puisque la « coutume populaire désigne l’endroit de son patronyme » (Lise Drolet, un paradis de villégiature : le bout de l’île, 1989 : p.43).

Néanmoins, le village aurait tout aussi bien pu adopter cette appellation en raison de son charme et de l’attrait qu’il exerce sur les visiteurs. Vers la fin du XVIIIe et le début du XIX siècle, la tendance veut que l’élite bourgeoise quitte la ville pour se réfugier à la campagne. Épargné des impuretés de la cité, le « Bout de l’île » devient rapidement un haut lieu de villégiature proposant un panorama incomparable et un large éventail de divertissements : le Château Bel-Air (aujourd’hui la Goéliche), le golf, les terrains de tennis, les pique-niques en plein air et les restaurants incitent les touristes à prendre quelques semaines de vacances et certaines familles à construire des villas pour y passer l’été.

Même si les loisirs prennent une place importante dans l’identité du lieu, l’église de Sainte-Pétronille, construite en 1871, domine en hauteur et remémore aux fidèles leurs devoirs. Une fois le clocher terminé en 1873, David Ouellet s’occupe de la conception et de la réalisation du décor de l’église en 1888. Il est également responsable de la fabrication du maître-autel et des autels latéraux (Patrimoine religieux de l’île d’Orléans, 2013 : p.14). Quelques biens mobiliers ont aussi été intégrés plus tardivement par des artisans locaux, comme la cuve des fonts baptismaux ouvragés par Conrad Lapointe.  

Il semblerait toutefois que l’église ne soit pas le premier lieu de culte du village, selon l’inventaire après décès de la femme d’un certain Gabriel Gosselin datant de 1652. Une chapelle, un petit bâtiment sans fondation au toit de paille, aurait desservie la pointe de l’île au XVIIe siècle. Très peu d’informations subsistent sur la construction et le rôle joué par cette chapelle rudimentaire. En dépit de ce silence, Sainte-Pétronille peut se targuer d’abriter le seul lieu de culte protestant sur l’île.

La présence anglaise et les influences anglicanes

Outre l’accaparement des terres de l’île par les troupes anglaises pendant la guerre de Conquête en 1759, une véritable communauté anglophone s’épanouit paisiblement au sein du village de Sainte-Pétronille au XIXe siècle. Issues de la riche bourgeoisie, des familles anglophones de médecins, de commerçants et de hauts dignitaires profitent de leur statut pour construire de petits cottages ou de grands domaines, tels que le domaine Porteous en 1900, réputés pour la splendeur de ses jardins à l’italienne.  La construction d’une chapelle anglicane en 1867, un acte symbolique de leur enracinement, prouve qu’une présence était déjà assurée par un noyau protestant au milieu du XIXe (RPCQ, « Chapelle Sainte-May », en ligne).

Reproduction fidèle des plans dessinés par l’architecte Edward Staveley, la chapelle de style néogothique révèle un intérieur sobre où les seuls éléments de décor s’avèrent les fonts baptismaux et le vitrail du chœur, taillé par l’artiste Wallace J. Fischer en 1904 (Patrimoine religieux de l’île d’Orléans, 2013 : p. 15). Le triptyque représente une scène de l’ascension, c’est-à-dire l’élévation du Christ vers le ciel suite à sa crucifixion et sa résurrection. Comme le souligne Robert Martel, le vitrail est le seul élément coloré d’un temple d’une grande simplicité (consulter l'entrevue)

chapelle anglicane
 © Pierre Lahoud

 

droite

Lumière sur : la dévotion à Sainte-Philomène

Après avoir ramené des reliques de la Sainte Philomène qu’il obtient lors de son séjour à Mugano en Italie, le curé Charles-Henri Paquet introduit la dévotion à la sainte en 1878 à l’île d’Orléans. Profitant de la popularité gagnée par le pèlerinage vers Sainte-Anne-de- Beaupré, le curé Charles-Henri Paquet invite les pèlerins à effectuer un détour vers l’église de Sainte-Pétronille pour y adorer sainte Philomène, une martyre romaine.

En plus de l’oratoire qu’il aménage au cœur de l’église, le curé fait la promotion de cette nouvelle dévotion par la publication d’une série d’opuscules intitulée : Le Propagateur de la dévotion à Ste Philomène au Canada. Distribué à partir de 1880, date qui correspond à l’inauguration du pèlerinage, ce petit livret fournit de précieuses informations quant à la réceptivité des autorités religieuses. L’Archevêque de Québec, par exemple, montre son approbation en autorisant la diffusion du livret à travers le diocèse; publication imprimée en plus de 4 000 exemplaires en l’année 1880.

Pour faciliter l’enracinement de ce nouveau culte, le curé Paquet met de l’avant une pratique de dévotion accessible, les neuvaines : « Qu’est-ce, en effet, qu’une neuvaine? La fidélité, pendant neuf jours de suite, à certains exercices de piété. […] Un cri de l’âme, de temps en temps, avec quelques mots tout simples pour l’exprimer, cela suffit […] » (Charles-Henri Paquet, Le propagateur 1881 : p. 11-12). Chaque opuscule propose donc un modèle de neuvaines à Sainte Philomène. Une partie est aussi réservée pour que soient rapportés les faits extraordinaires et les grâces obtenues. Outre Le propagateur, il existe un autre moyen pour prendre connaissance des faveurs exaucées et de la popularité du culte; les cœurs de dévotion. À l’intérieur de ces cœurs, on y trouve des petits bouts de papier sur lesquels sont écrits les noms des dévots, ou encore des vœux adressés à la sainte.

Le pèlerinage et la dévotion à Sainte Philomène a cependant été de très courte durée. Après le départ du curé Paquet en 1889, la ferveur du culte s’éteint progressivement et le dernier opuscule de la série est publié, mettant définitivement fin à un outil de promotion important. Quelques vestiges subsistent néanmoins de cette parenthèse religieuse dans l’histoire religieuse de Sainte-Pétronille. Grâce à la vitrine disposée à l’entrée de l’église, on peut toujours admirer les cœurs de dévotions et lire quelques prières autrefois adressées à la sainte.  

Coeur de dévotion © Florence Gagnon-Brouillet
gauche

Qu’en est-il aujourd’hui ?

Façade église de Sainte-Pétronille © Pierre Lahoud

Reconnue pour son acoustique exceptionnelle, l’église de Sainte-Pétronille est devenue le lieu de rencontre pour le milieu artistique de la musique de chambre où solo, duo, trio, quatuor et quintette partagent le chœur depuis déjà 35 ans. Lorsque sonnent les premières cloches de l’été, l’église se transforme en véritable boîte à musique. Protégée par un rempart d’arbres mûrs et un écrin de verdure, elle ouvre ses portes aux musiciens et visiteurs pour quelques heures de douce musique.

Endroit convivial favorisant les échanges, l’église de Sainte-Pétronille continue de vivre à travers ces concerts de musique de chambre orchestrés par des artistes hors pair, mais aussi grâce aux généreux bénévoles de la paroisse. Pendant la saison estivale, les guides touristiques accueillent les visiteurs sur le parvis de l’église, partageant l’histoire du bâtiment et du village à ceux qui veulent bien l’entendre. Il est hautement pertinent de rappeler que l’implication citoyenne des gens de l’île assure la vitalité de ce riche patrimoine religieux.    

Références

DROLET, Lise. « Un paradis de villégiature : le bout de l’île », Cap-aux-Diamants, 5, 1, 1989, p.43-45.

LÉGARÉ, Denyse et Paul LABRECQUE. Le patrimoine religieux. L’île d’Orléans, fertile en coups de cœur [brochure touristique], Île d’Orléans, 2010, 23 p.

PAQUET, Abbé Charles-Henri. Le propagateur de la devotion a Ste Philomene au Canada, Québec, Typographie de C. Darveau, 1881, 36 p.  

Répertoire du patrimoine culturel du Québec. « Chapelle Sainte-Mary » [En ligne]. http://www.patrimoine-culturel.gouv.qc.ca/rpcq/detail.do?methode=consulter&id=108498&type=bien#.XNGpBKaQhPM

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